« Il est urgent que nous devenions disciples-missionnaires »

Homélie de Mgr Christophe DUFOUR

Lambesc le dimanche 21 janvier 2018

3ème dimanche ordinaire année B

« Va » dit Dieu à Jonas. « Va à Ninive… ».

Viens Simon. Viens André… « Venez à ma suite » dit Jésus.

L’Église nous offre ce dimanche une Parole de Dieu en forme de va et vient. Elle nous entraîne dans le « va »  et dans le « viens » du Christ. Ou plus précisément dans le « Viens » et le « va ». Tout commence par le « Viens » de Jésus et se continue par le « Va ». Frères et sœurs, nous sommes appelés à entrer dans ce mouvement, appelés à devenir disciples-missionnaires.

« Venez à ma suite » dit Jésus. La première étape, c’est l’appel à être disciple. « Aussitôt, laissant leurs filets, ils le suivirent » dit le récit de l’appel des premiers disciples. L’évangéliste ne s’étend pas à nous raconter l’échange et le débat intérieur qui ont conduit les deux premiers disciples à la décision de suivre Jésus. Il nous communique la force d’une décision. Simon et André choisissent de suivre. Et cette décision a un préalable : laisser les filets. Frères et sœurs, qu’avons-nous abandonné pour suivre le Christ ?

« Va » dit Dieu à Jonas. « Va à Ninive, la grande ville païenne, et proclame le message que je te donne pour elle ». Après l’appel à suivre, l’appel à aller de l’avant et à proclamer le message. On sait que Jonas a rechigné, il lui a fallu du temps pour oser obéir à l’ordre de Dieu – souvenons-nous de la tempête qui l’a jeté à la mer, souvenons-nous des trois jours dans le ventre de la baleine, comme les trois jours de la Passion du Christ avant la résurrection. Le livre des Actes des Apôtres nous rapporte aussi l’hésitation de saint Paul avant d’aller à Corinthe peuplée de gens qui avaient très mauvaise réputation. « N’aie pas peur, lui dit Dieu dans la nuit, ne garde pas le silence, j’ai dans cette ville un peuple nombreux ». Les apôtres avaient reçu du Ressuscité leur ordre de mission : « Allez ! De toutes les nations faites des disciples ». Et l’on sait qu’ils avaient tremblé de peur. Mais l’Esprit Saint était avec eux…

Ainsi, après l’appel à être disciple résonne l’appel à être missionnaire. Baptisés, nous sommes appelés à devenir disciples-missionnaires. Le pape François nous le redit souvent. Voici ce qu’il écrit dans l’exhortation apostolique « La joie de l’Évangile » : « En vertu du baptême reçu, chaque membre du Peuple de Dieu est devenu disciple missionnaire ». Et il ajoute : « Nous ne disons plus que nous sommes ‘’disciples’’ et ‘’missionnaires’’, mais toujours que nous sommes ‘’disciples-missionnaires’’ » (EG 120). Et il insiste sur le trait d’union. Comment le chrétien devient-il missionnaire ? Réponse : « Tout chrétien est missionnaire dans la mesure où il a rencontré l’amour de Dieu en Jésus-Christ » (EG 120). « La joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus » (EG 1).

Je vous avoue avoir été marqué par la lecture du livre intitulé « Disciples-missionnaires de Jésus-Christ pour que nos peuples aient la vie en lui ». Je l’avais lu en 2008, juste avant d’arriver à Aix-en-Provence, j’étais encore à Limoges. Ce livre est la synthèse finale de l’assemblée des évêques d’Amérique latine et des Caraïbes qui s’était tenue à Aparecida au Brésil en 2007, et dont le secrétaire était le cardinal Bergoglio. Le cardinal Bergoglio est devenu le pape François qui ne cesse de nous exhorter à une « conversion pastorale et missionnaire ». Je l’ai amplement cité dans mes deux dernières lettres pastorales.

« J’espère que toutes les communautés feront en sorte de mettre en œuvre les moyens nécessaires pour avancer sur le chemin d’une conversion missionnaire… Constituons-nous dans toutes les régions de la terre en un état permanent de mission » (EG 25).

« J’imagine un choix missionnaires capable de transformer toute chose, afin que les habitudes, les styles, les horaires, le langage et toute structure ecclésiale deviennent un canal adéquat pour l’évangélisation du monde actuel, plus que l’auto-préservation » (EG 27).

« J’invite chacun à être audacieux et créatif dans ce devoir de repenser les objectifs, les structures, le style et les méthodes évangélisatrices de leurs propres communautés » (EG 33).

Interrogeons-nous – et je le fais pour moi-même aussi :

  • Avons-nous profondément le désir que le nom de Jésus soit connu et aimé ?
  • Avons-nous le cœur et la vie remplie de la joie de la rencontre du Christ ressuscité ?

La joie du disciple, la joie de mettre ses pas dans ses pas, la joie de l’imiter, la joie d’apprendre à aimer comme lui, la joie de le prier, la joie de le chanter. Et le désir du disciple-missionnaire, le désir que le nom de Jésus soit connu et aimé, le désir brûlant d’en témoigner.

Témoignage d’un enfant du KT invité à jouer au rugby : « Je viens jouer au rugby avec vous si vous venez au KT avec moi ».

Témoignage d’une catéchumène de Lambesc qui m’a raconté dans une lettre qu’elle était venue un dimanche pour voir ce qu’est la messe ; elle n’a rien compris, mais elle est revenue le dimanche suivant, et ce jour-là une paroissienne lui a dit « Bonjour » ; c’est par ce « bonjour » que tout a commencé, et elle est aujourd’hui baptisée.

Il est urgent que nous devenions disciples-missionnaires. Notre Provence est devenue terre de mission. Nous avons envoyé des missionnaires dans le monde entier, chez les Papous, chez les Inuks, et ils sont devenus chrétiens. Aujourd’hui, moins de 10% des enfants sont catéchisés, et plus de 40% des collégiens se disent sans religion. Par contre, entre 2008 et 2016, le nombre de jeunes de 18-30 ans se disant rattachés à une religion est passé de 34% à 53%. La quête spirituelle est immense dans la jeunesse. Saurons-nous être témoins de l’amour du Christ pour eux ?

J’en témoigne, la conversion missionnaire est commencée. De jeunes adultes de plus demandent à devenir chrétiens – j’ai passé la journée hier avec ceux qui seront baptisés cette année dans la nuit de Pâques. J’oserai dire avec le pape François : « Ne nous laissons pas voler l’enthousiasme missionnaire. Ne nous laissons pas voler la joie de l’évangélisation ». C’est ma prière avec vous ce matin : que l’Esprit Saint nous fasse devenir pêcheurs d’hommes, disciples-missionnaires. AMEN.