« Dieu veut libérer les prisonniers du mal qui les possède »

Le nouveau centre pénitentiaire d’Aix-Luynes 2 a ouvert ses portes début avril, à Luynes près d’Aix. Les premiers détenus sont arrivés, ce bâtiment flambant neuf a une capacité d’accueil de 1000 personnes. Aix-Luynes devient ainsi le troisième plus gros centre de détention en France.

Les prisonniers peuvent demander un accompagnement spirituel, puisqu’ils ne peuvent pas se rendre dans une église, un temple, ou une mosquée. C’est le rôle des aumôniers, et notamment les aumôniers catholiques des prisons. Pourquoi se préoccuper de personnes condamnées ? C’est la question posée cette semaine à Mgr Dufour dans l’émission Parole d’évêque.

Si on se place du côté des victimes, il pourrait paraitre choquant que l’Église catholique se préoccupe des personnes condamnées. Comprenez-vous ce reproche ?

Je peux le comprendre, mais celui qui a été un bourreau, celui qui a commis un délit, nous avons le désir qu’il change sa vie, qu’il ne soit plus bourreau, délinquant, qu’il ne commette plus de délit. Et la prison est normalement faite pour que la personne paye le prix et répare. Mais si c’est pour qu’il recommence quelques temps après…

Les personnes détenues peuvent vivre une véritable conversion en prison, une véritable transformation. Le Seigneur notre Dieu a pitié d’eux car ils sont enfermés dans leur mal, il a envie de les libérer de ce mal qui les possède. Et pour cela il a besoin de bras, de cœurs, d’oreilles et voilà pourquoi nous avons des aumôniers de prisons.

Vous parlez des souffrances, de quels types de souffrance s’agit-il ?

La première souffrance, c’est le remords. Tous n’ont pas de remords, certains sont enfermés dans leur mal, la rage les possède encore. Mais ce n’est pas, je l’espère, la majorité, il y a aussi ceux qui reviennent sur eux-mêmes, qui réfléchissent. La prison est un temps de réflexion et de conversion.

Que viennent donc apporter les aumôniers catholiques en prison ?

Les personnes détenues ne peuvent pas venir à nous, dans les églises, et la loi de 1905 de séparation des Églises et de l’État, c’est pareil pour les internats et les hôpitaux, leur permet de vivre leur foi.

La première chose, c’est la rencontre. Il faut que les aumôniers aient une qualité de rencontre pour gagner la confiance. Ce n’est pas facile de gagner la confiance. Cela suppose d’être plein de tendresse, d’affection et en même temps, il faut être père aussi parce que beaucoup n’ont pas eu de père. Un aumônier me racontait qu’un jour un garçon de 18 ans lui demande une Bible, l’aumônier la lui donne en disant de lire l’histoire de Moïse. 15 jours plus tard, ils se retrouvent et le jeune lui dit « c’est extraordinaire ce passage » tout en montrant le décalogue et en particulier « tu ne voleras pas, tu ne tueras pas ». Et le jeune ajoute « on ne me l’avait jamais dit ». Donc il n’avait pas la conscience du bien et du mal, il n’avait jamais été éduqué dans la conscience du bien et du mal, donc les aumôniers sont des éducateurs, des éducateurs des consciences.

Après ce travail patient de rencontres, de l’établissement d’une relation qui s’est établie dans la confiance, il y a petit à petit ce désir de connaitre Dieu, de connaitre le Christ. Les aumôniers ont aussi une mission d’éveil à la foi.

Les aumôniers, qui annoncent un Christ qui pardonne tout, remettent-ils en cause la justice humaine ?

Jamais l’Église ne remet en cause la justice humaine. Dieu est justice, nous serons jugés par Dieu, le christ est le jugement de Dieu ; face au Christ, nous sommes pêcheurs, la lumière du Christ met en lumière notre péché et notre mal.

Parmi les détenus, beaucoup ont été baptisés, ils ont peut-être grandi dans la foi, donc c’est l’occasion de faire une révision de leur vie devant le Christ.

Et le principal travail, c’est les groupes bibliques. Les détenus sont très heureux de se retrouver en petites équipes de 7, 8, 10 ou douze avec un aumônier. Ils ont des petites rencontres et les temps de partage sont absolument merveilleux. Il y a donc les visites dans les cellules, les groupes de partage, et puis le samedi souvent, l’eucharistie. Pour la messe, tous vous pouvez être volontaires pour participer, moyennant simplement une autorisation de la prison.

L’aumônier catholique vient-il pour enseigner ?

Il ne vient pas faire un cours, il vient être le maitre pour donner dans ce partage biblique quelques lumières, mais peut-être écoutera-t-il aussi les belles lumières des personnes détenues qui auront une inspiration de l’esprit saint. En effet il a un peu d’avance dans la lecture, il a lui-même médité longuement ces passages de l’écriture et de la bible et pourra donner quelques éclairages pour comprendre la parole.

Vous allez régulièrement visiter les personnes détenues. Qu’attendent-ils de vous, en tant évêque catholique ?

Aix et Arles est le diocèse qui comprend le plus de centres détention : une maison d’arrêt, une centrale et trois centres de détention. Les prisonniers sont très honorés. Ils attendent d’être reconnus comme des personnes humaines. Je leur dit, surtout au moment des fêtes religieuses, « je vais prier pour vous, vous serez présents dans la messe de Noël et de Pâques que je vais célébrer à la cathédrale, et je vais le dire. ». Il faut vraiment qu’ils se sentent partie prenante de notre famille église.

C’est un petit peu la lumière qui vient à eux. Pour moi, cela beaucoup de sens : Noel ou Pâques sans aller en prison, la fête n’est pas complète.

Jésus-Christ a-t-il donné l’exemple ?

Oui ! « L’Esprit saint est sur moi, il m’a envoyé annoncer aux prisonniers leur délivrance » dit Jésus-Christ. Et la première prison, c’est celle de notre péché. Le christ veut d’abord nous libérer du mal. Et c’est la prière du Notre-Père « délivre-nous du mal ». C’est la prière essentielle que nous devons faire. Et le contact avec les personnes détenues donne plus d’intensité et de force à notre prière « délivre-nous du mal ».

L’aumônier en prison vient-il libérer de la culpabilité ?

La culpabilité, nous devons tous nous en être libérés. La culpabilité est un poison. La conscience du mal que nous avons fait est différente de la culpabilité. La conscience du mal que nous avons fait ouvre à la capacité de reconnaitre le pardon de celui qui vient me pardonner. Dieu pardonne à celui qui demande pardon. Celui qui a conscience de son mal, Dieu vient le tirer de sa misère. Celui qui s’enferme dans son péché, parfois par orgueil, celui qui ne pleure pas devant son péché, celui-là ne peut pas s’ouvrir au pardon.

Y a-t-il des conversions en prison ?

Un de mes grands soucis, c’est que les personnes qui se convertissent ne trouvent pas, à leur sortie de prison, de famille de Dieu capable de les accueillir, du moins dans notre église catholique. Quand je vais célébrer la messe dans une paroisse et que je rencontre une personne sortie de prison, je suis heureux, je me dis « ça y est, l’église a fait son boulot, elle l’a accueilli ».

Venez et Voyez !

Avec l’ouverture de la prison Luynes 2, l’équipe d’aumônerie catholique du diocèse recherche des volontaires pour assurer ce service auprès des détenus de Luynes. Les personnes intéressées sont invitées à contacter la responsable Martine Rancoule, martine.rancoule@free.fr – 06 11 65 95 65

Vous serez d’abord conviés à assister à une messe ou célébration dans une prison, ou à un autre service assuré par l’équipe de bénévoles.

Avec l’ouverture de la prison Luynes 2, l’équipe d’aumônerie catholique du diocèse recherche des volontaires pour assurer ce service auprès des détenus de Luynes. Les personnes intéressées sont invitées à contacter la responsable Martine Rancoule, martine.rancoule@free.fr – 06 11 65 95 65