Guézou, talentueux dessinateur humoristique au service de l’Évangile

Yves Guézou, dessinateur humoriste, sera l’invité du second Forum spi Quels talents ?! le 24 novembre à Martigues. Après une redécouverte de la Foi, il a choisi de mettre son talent au service de l’annonce de l’Évangile.

Avez-vous toujours eu le talent de dessinateur ?

J’ai toujours eu de la vie au bout du crayon. Il y a donc une part d’inné car personne dans ma famille n’est artiste, personne de mon entourage n’a pu m’apprendre. J’ai toujours beaucoup dessiné. Mais au lieu de partir dans une voie artistique, après le bac, j’ai fait une école de commerce. Ces études m’ont permis de développer un autre talent : l’esprit de synthèse, le recul, l’esprit analytique. Cette capacité à synthétiser est indispensable pour croquer en un dessin les traits des gens, le caractère, l’aspect cocasse ou décalé d’une situation. J’aimais dessiner pendant les cours, surtout ceux de comptabilité et de droit du travail.

J’ai tout de même travaillé mon coup de crayon en suivant des cours du soir, en auditeur libre, aux Beaux-Arts de Paris. J’ai suivi un atelier de sculpture, à l’ancienne. Avant de se lancer dans le travail de la pierre, il fallait apprendre à dessiner, étudier les mouvements, la profondeur, les volumes. Cela m’a beaucoup décontenancé, car je savais dessiner en deux dimensions, mais sans profondeur. J’ai appris l’utilisation des couleurs. Donc j’avais au départ deux talents, le dessin et l’esprit synthétique doublé d’un certain humour, je les ai travaillés pour progresser. Je suis comme un pianiste professionnel qui a joué et rejoué ses gammes.

 

Yessss !!! Editions Salvator Famille Chrétienne Salon « AuTours des Auteurs »

Publiée par Guézou sur Mercredi 10 octobre 2018

Avez-vous immédiatement mis vos deux talents au service de l’Église ?

Non, j’ai commencé par travailler pour des médias, des agences de publicité, des entreprises. Après mon école de commerce et le service militaire, je me suis dit que ma voie ne serait pas commerciale. J’ai donc opté pour le dessin humoristique. L’école de commerce m’avait appris à me vendre, à frapper aux bonnes portes. J’ai travaillé pour des grands médias [Le Point, NDLR]. Je mettais de l’humour partout, dans les livres scolaires, les livres parascolaires. Mais c’était presque de l’humour cynique. Je n’envisageais pas de travailler pour le monde chrétien car je m’étais éloigné de la foi vers 17-18 ans. À cet âge-là, je n’avais pas fait l’expérience de la « Rencontre » avec le Christ, et j’étais gêné par la différence entre le message évangélique joyeux et les têtes d’enterrement des pratiquants que je côtoyais.

Qu’est-ce qui vous a décidé à travailler pour le monde chrétien ?

J’ai fait une grosse dépression, j’ai même envisagé de suivre la même voie que mon maître à penser, Chaval [il s’est suicidé, NDLR]. Un soir en l’église Saint-Gervais à Paris, j’ai crié mon désespoir, et pour la première fois, j’ai ressenti la présence réelle, la puissance de cet amour consolateur donné par Dieu. J’ai donc recommencé un chemin de foi. J’ai rencontré ma femme, nous nous sommes mariés, et nous sommes partis vivre à 30 km de Salvador de Bahia (Brésil). J’ai traversé une crise du dessin, j’ai envisagé d’abandonner l’art pour me consacrer à la mission que nous assurions : la gestion d’un centre d’accueil pour des enfants des rues. Mais un enfant s’est annoncé, nécessitant une prise en charge médicale importante. Nous sommes donc rentrés en Europe, et j’ai repris mes crayons. Après cette « rencontre avec le Christ » j’ai eu besoin de mettre mes capacités au service de ma Foi, de l’évangélisation. J’ai senti que ma foi me permettrait de développer mon talent de la meilleure façon. J’ai donc frappé aux portes. La communauté des Béatitudes a lancé ma carrière chrétienne en me confiant l’illustration d’un premier ouvrage. Ensuite le magazine Famille Chrétienne a suivi.

Votre dessin a-t-il changé pour s’adapter au ton de l’univers chrétien ?

Je réponds OUI et NON. Mon état d’esprit a changé : je ne suis plus dans le cynisme, j’essaie d’être bienveillant, comme Sempé. Mais je garde cet esprit analytique qui me permet de repérer les petites incohérences que nous avons, nous chrétiens. J’ai gardé cet humour mais je suis désormais joyeux. Pour moi, la foi est source de joie, et le rire est expression de la foi. Je suis convaincu que Jésus-Christ riait beaucoup. Du ciel, Dieu doit sourire en voyant nos petites dérives, nos petits travers, comme un père réprime difficilement un sourire quand son enfant fait une bêtise. L’humour et la joie sont la respiration de la Foi.

Votre talent touche-t-il au-delà des chrétiens ?

Mes dessins humoristiques sont des ponts vers les autres croyants ou les incroyants. Je me rappelle une mission d’évangélisation avec Jeunesse Lumière pendant le festival OFF d’Avignon. Dans la chapelle des pénitents gris, étaient exposés mes dessins, les dernières découvertes scientifiques sur le linceul de Turin et le Saint-Sacrement. Les visiteurs entraient, riaient devant mes dessins. Ce rire crée une communion d’esprit, une complicité qui permet de prolonger la conversation et d’entrer en évangélisation. Le rire, par mes dessins, est un pont vers les personnes qui pensent différemment.

Yves Guézou vient de publier un nouvel ouvrage illustré : Du rififi chez les Bergeome, aux éditions Salvator.