Témoigner, c’est annoncer sans chercher à convaincre

Entre le 9 janvier et le 7 février, une soixantaine de personnes a participé aux cinq soirées organisées par la paroisse de Notre-Dame de l’Arc (Aix) pour apprendre à témoigner. Pour le père Etienne Kern, son curé, le témoin proclame les merveilles que Dieu a faites dans sa vie.

Qu’est-ce que le témoignage ?

Père Étienne Kern

Le témoignage consiste à raconter, de manière sobre et construite, l’action de Dieu dans sa vie. On peut donc partager une conversion radicale, ou sinon la manière dont Dieu a accompagné la personne tout au long de sa vie.

Je prends deux modèles bibliques : saint Paul Apôtre et saint Jean l’évangéliste. Les conversions du type « saint Paul » manifestent l’intervention puissante de Dieu. D’autres vivent une sorte de lent compagnonnage, comme saint Jean. Cet autre type de relation à Dieu montre la simplicité de son action dans la vie.

Les deux types de témoignages sont nécessaires et font grandir dans la foi. Il s’agit de témoigner de cette relation personnelle que l’on entretient avec Dieu, ou de raconter la rencontre avec le Seigneur qui a tout changé. Le témoignage suppose de fréquenter Jésus, de le connaître. On ne peut pas parler de Dieu si on ne le connait pas, si on ne lui parle pas.

Pour témoigner, il faut prendre conscience de l’action de Dieu dans sa vie. Comment faire cette relecture ?

En prenant un temps de solitude, il faut adopter un regard contemplatif, non pas sur ses propres actions, mais sur celles de Dieu. Par la relecture de notre propre histoire, on discerne une alliance entre Dieu et chacun de nous à travers la succession d’événements que constitue notre vie.

Pour relire sa vie, j’invite les uns et les autres à s’interpeler, à s’inviter au témoignage. Cette interpellation incitera sûrement quelques-uns à se poser pour réaliser ce travail de relecture.

L’expérience du témoignage montre qu’en parlant aux autres de sa relation à Dieu, on l’approfondit : l’altérité nous fait accéder à toujours plus d’intériorité. En disant les merveilles que Dieu a fait pour moi, je les « réalise », dans le sens de « prendre conscience » et « rendre réel ».

Je conseille d’écrire ces souvenirs car l’écriture introduit une cohérence entre ceux-ci et fait remonter d’autres souvenirs encore.

Mais quelle est la différence avec la séance de psychologie ?

Pour éviter de dériver vers la séance de psychologie, il faut se mettre face à Dieu. Parce qu’il éclaire nos vies, nous les relisons à sa lumière. La miséricorde de Dieu vient donner la force d’affronter les traumatismes ou les horreurs commises précédemment. Il s’agit de prendre conscience du regard d’amour et de miséricorde de Dieu sur nos errements et blessures passés.

Enfin, si besoin, on peut être accompagné par un psychologue, un thérapeute, un conseiller spirituel…

Quand on a vécu des difficultés dans le passé, on a pu avoir le sentiment d’être abandonné par Dieu. Il peut être difficile voire impossible de se dire que Dieu nous accompagnait à ce moment-là…

Il s’agit de relire la vie passée à la lumière de la vie spirituelle présente. Le pape François incite à « prier avec son Histoire ».

Le témoignage est-il du prosélytisme ?

Le prosélytisme consiste à obliger autrui à adhérer à telle ou telle religion.

En France, on a tendance à se méprendre sur la notion de laïcité et du coup, on considère toute manifestation spirituelle comme du prosélytisme. On s’interdit alors toute parole publique de foi. Mais l’État est laïc dans le sens où il ne prend parti pour aucune religion ; la société, elle, est multireligieuse. La vie de foi suppose de respecter la laïcité de l’Etat mais elle contient une dimension publique qu’elle doit assumer. Le témoignage consiste à annoncer, et pas à convaincre.

Est-on obligé de témoigner par la parole ?

Nous sommes appelés à témoigner avec tout ce que nous sommes : actes, parole, prière, offrande. Il faut chercher à intégrer toutes ces manières. Mais surtout, il ne faut pas attendre d’être parfait pour témoigner. Le témoignage est un cercle vertueux : plus on parle de sa relation avec le Christ, plus on se rapproche de lui par la prière, la lecture de la parole et les actes.