Notre-Dame de Paris : « la vie est faite de chutes et de relèvements »

 

Au lendemain de l’incendie qui a ravagé la cathédrale Notre-Dame de Paris le 15 avril 2019, le père Michel Desplanches, vicaire général du diocèse d’Aix a affirmé sur France Bleu Provence son espérance.

Thibault Maisonneuve : Vous la connaissez Notre-Dame de Paris ?

P. M. D. : J’y ai passé mes années d’étudiant, comme musicien puisqu’avant d’être prêtre, j’ai eu une autre vie, à la cité des arts. Je servais la messe, quand j’étais étudiant à Paris. J’y ai vécu de grands moments puisque j’y ai choisi ma vie : en devenant prêtre, j’ai choisi de suivre l’appel du Seigneur. Notre-Dame, c’est le lieu où ma vie a basculé.

T. M. : Vous avez célébré la messe dans les années 80’ au moment de la visite de Jean-Paul II ?

P. M. D. : Je n’ai pas célébré la messe puisque c’était avant mon entrée au séminaire. C’est là que beaucoup de choses se sont décidées, quand Jean-Paul II est venu à Notre-Dame. C’est inouï de beauté, de fête. Notre-Dame, c’est la joie, la fête et la culture qui se mélangent à la splendeur de la musique. Moi qui suis musicien, j’ai toujours été extrêmement touché par ce lieu. Ce n’est pas seulement un bâtiment, un musée que nous voyons abimé aujourd’hui, c’est un monument vivant ! C’est là-dedans que s’exprime le meilleur de l’art plastique, mais aussi de la musique.

T. M. : Vous avez tenu à nous faire entendre cet extrait du Magnificat royal…

P. M. D. : C’est le chant emblématique c’est le cantique de la vierge. C’est en entendant cette musique que Paul Claudel s’est converti à Notre-Dame de Paris. Le soir, lors de l’office des vêpres, quand résonne le Magnificat royal, c’est un moment un moment d’émotion absolument unique.

T. M. : Quelle a été votre première réaction quand vous avez vu ces images, celle de la flèche qui s’effondre ?

P. M. D. : La sidération ! Nous étions hier soir en pleine célébration de la messe chrismale dans la cathédrale d’Aix-en-Provence, quand pendant la communion, nous avons vu circuler des images sur les téléphones portables et nous avons ainsi appris la nouvelle. Une sidération ! Impossible de prononcer un mot, les jambes en coton. C’est inimaginable ! On ne pouvait pas imaginer Notre-Dame s’écroulant.

T. M. : Le péril du feu est écarté mais on ne sait pas comment la structure va résister…

P. M. D. : Exactement, on sait bien qu’après un incendie, un bâtiment est fragilisé dans sa structure. On ne peut s’empêcher de penser à l’immobilier. Par exemples, les orgues. C’est un trésor organistique inouï, entre le grand orgue et l’orgue de chœur, qui sont deux instruments uniques en France, deux instruments absolument fabuleux. S’ils ne sont pas brûlés, ils sont sûrement noyés.

T. M. : Vous avez entendu le témoignage d’une auditrice, pleine d’espoir, qui disait que ce bâtiment allait être ressuscité…

P. M. D. : La vie est faite de chutes et de relèvements. Lors de la semaine sainte, nous célébrons justement la vie faite de chutes et de relèvements : le Christ qui meurt et qui ressuscite. Il me semble que Notre-Dame nous mène sur ce chemin-là. Oui, la fragilité de toute chose humaine nous apparait avec violence, et en même temps, la puissance de la résurrection c’est l’espérance qui renait. Il y a un élan de création qui ne peut pas s’éteindre chez l’homme. L’Église catholique a toujours suscité chez les artistes le meilleur d’eux-mêmes. Elle l’a fait hier, elle le fera demain. C’est un trésor pour l’humanité et pas seulement pour l’Église catholique.

T. M. : Quel que soit l’appartenance à une religion…

P. M. D. : Bien évidemment. Mais vous savez, le but de la foi n’est pas de vivre en petite secte repliée sur soi, c’est d’offrir à l’homme le meilleur de ce qu’il peut produire. Nous croyons que Dieu donne, et les dons que nous portons sont au service de sa gloire. Et c’est ainsi que l’on a construit Notre-Dame. On l’a fait hier, on le refera demain, et tout cela est un trésor pour l’humanité.

T. M. : Ça va prendre du temps !

P. M. D. : Des décennies ! On a mis 40 ans à reconstruire la cathédrale de Reims après les bombardements du kaiser. C’est un travail colossal d’ingénierie, de taille de pierre. Heureusement nous possédons tous les plans de Viollet-le-Duc, ce qui permet d ‘avoir un projet.

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