Confinés ! Méditons et prions : n°6

Pendant la période de confinement, le diocèse d’Aix-en-Provence et Arles vous propose chaque jour un temps de prière en communion fraternelle composé de : la lecture de la Parole du jour, une méditation écrite par un curé du diocèse, et la « Prière en temps d’épidémie » à réciter ensemble à midi. Aujourd’hui la méditation nous est proposée par le père Daniel Bourgeois, curé de la paroisse Saint Jean de Malte à Aix.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean (7, 40-53)

En ce temps-là, Jésus enseignait au temple de Jérusalem. Dans la foule, on avait entendu ses paroles, et les uns disaient : « C’est vraiment lui, le Prophète annoncé ! » D’autres disaient : « C’est lui le Christ ! » Mais d’autres encore demandaient : « Le Christ peut-il venir de Galilée ? L’Écriture ne dit-elle pas que c’est de la descendance de David et de Bethléem, le village de David, que vient le Christ ? » C’est ainsi que la foule se divisa à cause de lui. Quelques-uns d’entre eux voulaient l’arrêter, mais personne ne mit la main sur lui. Les gardes revinrent auprès des grands prêtres et des pharisiens, qui leur demandèrent : « Pourquoi ne l’avez-vous pas amené ? » Les gardes répondirent : « Jamais un homme n’a parlé de la sorte ! » Les pharisiens leur répliquèrent : « Alors, vous aussi, vous vous êtes laissé égarer ? Parmi les chefs du peuple et les pharisiens, y en a-t-il un seul qui ait cru en lui ? Quant à cette foule qui ne sait rien de la Loi, ce sont des maudits ! » Nicodème, l’un d’entre eux, celui qui était allé précédemment trouver Jésus, leur dit : « Notre Loi permet-elle de juger un homme sans l’entendre d’abord pour savoir ce qu’il a fait ? » Ils lui répondirent : « Serais- tu, toi aussi, de Galilée ? Cherche bien, et tu verras que jamais aucun prophète ne surgit de Galilée ! » Puis ils s’en allèrent chacun chez soi.

La méditation proposée par le père Daniel Bourgeois, curé de la paroisse Saint Jean de Malte

On se demande parfois pourquoi l’évangile de Jean est devenu très tôt dans l’histoire de la liturgie le texte qui, par excellence, accompagnait l’ultime préparation des catéchumènes au baptême. Pourtant, parmi les nombreuses raisons, l’une d’entre elles saute aux yeux : c’est parce que Jean est l’évangéliste du mystère de l’eau vive. Dès le début : l’insistance sur le baptême du Christ ; puis l’usage de l’eau pour les noces de Cana ; la rencontre avec la Samaritaine et la promesse de l’eau vive ; la guérison du paralytique à la fontaine de Bethesda ; et finalement le passage du chapitre 7 que nous lisons aujourd’hui et qui est un appel lancé par le Christ à tous ceux qui sont autour de lui : « Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi et qu’il boive ! » (Jn 7, 37), parole que l’évangéliste interprète en citant un autre texte : « De son sein couleront des fleuves d’eau vive ». Bien entendu il faut citer encore le passage célèbre du coup de lance et qui est comme l’accomplissement de tout ce que je viens de citer précédemment.

Tout cela, ne constitue que le recensement matériel de ces passages de l’Évangile. Mais pourquoi Jean attache-t-il une telle importance à la symbolique de l’eau, et plus spécialement lorsqu’il s’agit d’eau vive ? Entre autres raisons, mais ce n’est pas la seule, c’est parce que l’eau dans son jaillissement de source est l’image d’une réalité totalement différente de celle dont elle jaillit. On se souvient de plusieurs citations de l’Ancien Testament qui soulignent avec émerveillement que l’eau jaillit du rocher. À la différence de l’eau de mer (imbuvable) et de l’eau de pluie qu’on n’arrive pas à capter parce qu’elle court sur le sol (insaisissable), l’eau de source provient du roc et des profondeurs de la terre avec une fraîcheur, une transparence et une abondance inexplicables.

C’est précisément le statut de la Parole de Jésus dans ces chapitres 7 et 8 de l’Évangile. Cette parole surgit dans le brouhaha de la foule, des théologiens et des lettrés qui enseignent dans les parvis du temple, dans la cohue des marchands et des changeurs, et dans les cris et les hurlements des soldats de la garde du temple qui sont envoyés pour le chercher et l’arrêter. À première vue, on pourrait croire que c’est Jésus lui-même qui a déclenché ce charivari par le côté paradoxal de son enseignement et de ses gestes. Pourtant, il ne s’agit pas de cela : certes, il crie à peine voix pour inviter ses auditeurs à venir boire sa Parole s’ils ont soif. Mais les autres paroles sont d’une discrétion déroutante. « Là où je vais, vous ne me trouverez pas, vous ne pouvez venir » (Jn 7, 34). C’est le secret de l’eau vive : elle sort on ne sait d’où, et si on se met à en boire, elle nous emmènera mystérieusement dans un espace que nous ne savons pas maîtriser. Nous sommes un peu comme les soldats de la garde du temple. Lorsqu’ils sont envoyés par les autorités du temple ils n’arrivent pas à mettre la main sur Jésus.

L’eau vive dont nous parle Jésus, c’est précisément sa Parole et son action dans ce qu’elles ont d’insaisissable. Et ce n’est pas parce que sa Parole nous semble à notre libre disposition dans le texte des Évangiles que nous avons le droit de la manipuler, de l’arranger ou de l’exploiter à notre profit, ou ce que nous pourrions considérer comme un profit pour les autres. Hier soir en consultant un site Internet, j’ai eu l’immense surprise de constater qu’un « marchand du Royaume » – comme il y avait à l’époque de Jésus des marchands du temple – proposait des coques de smartphones de toutes couleurs et de toutes figures pieuses ! Quelle horreur, et quelle misère spirituelle autant pour ceux qui les inventent et les vendent que pour ceux qui les achètent ! Bientôt, nous aurons des utilisateurs de smartphones qui répéteront comme des perroquets : « Jamais un homme n’a parlé comme celui-là » (Jn 7, 46).

Alors, au lieu d’eau vive, il ne nous restera plus que de l’eau tiède…

Prière

Nous pouvons réciter ensemble à midi, un « Je vous salue Marie », un « Notre Père », et la « Prière en temps d’épidémie » écrite par un prêtre du diocèse :

Prière en temps d’épidémie

Saint Roch et saint Sébastien, amis du Seigneur Jésus, vous qui avez connu l’épreuve de la souffrance et de la maladie, soyez aujourd’hui les ambassadeurs de notre prière auprès de Dieu notre Père. En ce temps d’inquiétude et d’incertitude, nous recourons à vous avec confiance pour demander votre intercession.

Comme nos aïeux en Provence qui n’ont jamais désespéré de Dieu dans les pires moments des épidémies de peste et se sont toujours confiés à vous, nous renouvelons cette fidélité à l’heure du coronavirus qui nous frappe aujourd’hui.

Grand saint Roch, grand saint Sébastien, vous qui contemplez le visage de Dieu dans la gloire du ciel, voyez vos frères et sœurs d’ici-bas qui sont aux prises avec les flèches de la maladie aux quatre coins du monde.

Vous qui goûtez la plénitude de l’amour du Saint-Esprit, demandez-lui pour nous la fraîcheur dans la fièvre, la guérison pour ce qui est blessé.

Vous que la sainte Vierge Marie a présenté à Dieu après l’épreuve, demandez-lui de nous prendre dans son manteau de miséricorde et de dire à son Fils que nous manquons du vin de la joie.

Vous qui avez risqué votre vie pour annoncer à tous la Vie qui est en Jésus, confiez au divin médecin toutes les personnes qui luttent au chevet des malades, qui se dépensent pour leurs frères et cherchent pour développer des traitements.

Vous qui avez vécu en fils de l’Église en toutes circonstances, priez pour que les chrétiens donnent à tous le témoignage humble de leur confiance paisible, de leur charité active, et de leur espérance invincible qui viennent du cœur du Christ.

Vous qui ne vous êtes jamais résignés au mal, obtenez-nous de ne céder ni au fatalisme ni à la panique, mais d’avancer dans ces quarante jours de Carême les yeux fixés sur la croix de Jésus, mort et ressuscité, en qui est la victoire totale et définitive sur le mal.

Glorieux saint Sébastien et saint Roch, nos amis dans la difficulté, demandez-le à Dieu notre Père, par Jésus-Christ notre Seigneur, qui vit et règne avec lui dans l’unité du Saint-Esprit, maintenant et pour les siècles des siècles.

Amen.

Saint Roch, priez pour nous.

Saint Sébastien, priez pour nous.