Cinquième dimanche de Pâques : « Le chemin du Seigneur nous annonce le but et l’aboutissement de notre vie »

Dans son homélie du cinquième dimanche de Pâques, André Barnoin, diacre de la Cathédrale Saint-Sauveur d’Aix-en-Provence, nous invite à suivre le Christ. Jésus qui est le chemin de Vie, vient nous rappeler de marcher à ses côtés pour découvrir la plénitude de la vérité.

 

Nous sommes au soir du Jeudi Saint, le Seigneur a lavé les pieds de ses disciples, le repas est terminé, Juda vient de quitter la pièce où tous sont réunis. Les onze sentent que quelque chose de grave se prépare. Le Seigneur leur parle et il se veut rassurant : « Ne soyez pas bouleversés ! ». Oh combien cette parole est d’actualité… Bouleversés, inquiets, apeurés on ne peut que l’être en ces jours dramatiques que nous traversons : l’épidémie, les malades, les décès, l’économie qui s’effondre, le chômage qui augmente, tout est remis en question et quel va être l’avenir ?

« Ne soyez pas bouleversés, je suis le chemin, la vérité, la vie … Croyez en moi ! » Et là, merci Thomas, comme il est sympathique cet apôtre dont l’étymologie de son nom signifie « jumeau ». Lui qui a côtoyé le Seigneur durant 3 ans, ne sait pas ou ne comprend pas où conduit le chemin du Seigneur. Nous sommes tous des frères jumeaux de Thomas et cela est rassurant. Ce qu’il faut comprendre c’est que le Seigneur ne se contente pas de nous montrer le chemin car c’est lui le chemin : le chemin de rencontre. Durant sa vie publique, il a sillonné les routes de Palestine et hors de Palestine, il n’était pas confiné ! Il a provoqué des rencontres qui ont pu paraître fortuites ou le fait du hasard pour ses disciples ou pour les foules : la Samaritaine au puits de Jacob, la païenne avec qui il discutait devant ses disciples étonnés, Zachée perché sur son arbre, le collaborateur qui percevait l’impôt au profit de l’occupant romain, chez qui il s’invite au grand dam des bien-pensants, Cléophas et son compagnon désabusés et résignés sur le chemin d’Emmaüs, et plus tard, après son retour vers le Père, Saul

sur la route de Damas celui qui persécutait les disciples de ce Jésus, celui qui allait devenir Paul l’apôtre des nations. Tous ont été transformés, tous ont eu leur vie transformée.

Le chemin du Seigneur n’est pas un chemin d’errance, il nous annonce le but et l’aboutissement de notre vie : le Seigneur veut nous conduire auprès du Père. Son projet : rassembler tous les hommes, il nous prépare une maison dans laquelle tous nous serons accueillis avec amour.

Le tracé, le revêtement de ce chemin c’est la vérité : c’est en Jésus que nous trouvons la plénitude de la vérité. Il nous révèle le vrai visage de Dieu. C’est en regardant vers le ciel que nous redécouvrons le vrai sens de notre vie. Cet évangile est un appel à l’espérance, même si nous sommes bouleversés par les incertitudes et les épreuves que le monde… que nous-mêmes traversons aujourd’hui. Succomber au découragement serait pire que tout. Tout à l’heure nous avons chanté dans le psaume : « Le Seigneur veille sur ceux qui l’aiment et qui espèrent en son amour. » Le Seigneur marche à nos côtés et nous redit inlassablement : « Croyez en moi ! » et il insiste : « Si vous ne croyez pas mes paroles regardez mes actes , ma manières de vivre… » J’ai ouvert les yeux des aveugles, les oreilles des sourds, je suis allé à la rencontre des confinés : j’ai guéri les lépreux, j’ai pardonné aux pécheurs : la femme adultère, j’ai relevé ceux qui ne pouvaient plus marcher : les paralytiques et les malades, ceux qui étaient écrasés par les soucis ou le poids de la vie, j’ai nourri ceux qui avaient faim de pain et de justice, j’ai encouragé et partagé. Tout cela n’est-il pas signe de vie !! C’est ce que Jésus, qui ajustait ses actes à sa parole, a fait avant sa mort et qu’aujourd’hui, lui le ressuscité, veut continuer à faire avec nous, lui le chemin de vie.

Il est vrai que ce chemin n’est pas celui de la facilité, il est étroit et nous conduit vers une porte étroite : notre vie est un combat de tous les jours contre les forces du mal qui cherchent à nous entraîner vers des chemins de perdition, ces chemins qui se trouvent à des carrefours et à l’entrée desquels est planté un panneau : voie sans issue ou sens interdit, panneau que Satan pudiquement s’empresse à camoufler pour nous désorienter. Mais heureusement le Seigneur veille et comme pour Saul, il est là pour nous dire que nous faisons fausse route et heureux est-il de nous donner son pardon dans sa grande miséricorde et son grand amour, et heureux sommes-nous si en toute humilité nous ouvrons notre cœur pour l’accueillir dans le sacrement de la Réconciliation.

Dans la 1ère lecture, le Livre des Actes des Apôtres nous montre comment les premiers chrétiens ont choisi ce chemin du Christ. Après quelques difficultés, la Parole de Dieu est annoncée aux païens, les veuves ne sont pas abandonnées à leur triste sort, le partage des services se met en place : c’est ainsi qu’une communauté se met en route à la suite du Christ.

Aujourd’hui dans la tourmente que traversent notre monde, notre société nous avons à être présents à nos frères : ne pas se résigner au mal, ne pas céder au fatalisme ni à la panique comme nous le demandons quotidiennement dans la prière en temps d’épidémie. Dans l’impossibilité de partager le pain de vie provisoirement, nous pouvons nous nourrir de la Parole du Christ, la méditer, la ruminer, la partager, en vivre et en témoigner par nos engagements les plus petits fussent-ils auprès de ceux et celles qui sont meurtris par la maladie, par un deuil, par le chômage, auprès de ceux et celles qui ont peur de l’avenir et de ses incertitudes. À travers eux, c’est le Christ lui-même qui nous interpelle et que nous rencontrons : devenons alors chemin de vie pour nos frères .

Pour conclure, voici quelques paroles de saint Augustin :

« Sur terre, c’est l’espérance qui nous fait chanter… chante mais en marchant. Oublie ta fatigue en chantant, mais prend garde à la paresse… Chante et marche sans te tromper de route, sans revenir en arrière, sans piétiner sur place. Chante et marche !! »