« Jamais je ne perdrai mon espérance » : les funérailles de Mgr Claude Feidt

Ce mardi 20 octobre 2020 s’est déroulée en la cathédrale Saint-Sauveur la messe de funérailles de Mgr Claude Feidt, archevêque émérite d’Aix et Arles. De nombreux fidèles se sont rassemblés pour dire un dernier au revoir à celui qui fut archevêque d’Aix-en-Provence et Arles de 1999 à 2010. Dans son homélie, Mgr Dufour a rappelé la place de l’espérance dans la vie de Mgr Claude Feidt.

« Jamais je ne perdrai mon espérance ». Cette parole est la petite perle que Mgr Feidt nous a laissée et que nous avons découverte après sa mort, en exergue de son testament spirituel. « Jamais je ne perdrai mon espérance ». J’entrevois ici l’âme cachée de mon frère Claude, si souvent inquiet et tourmenté – et il y a de quoi l’être dans une vie d’évêque !  Les matins étaient chez lui toujours remplis du vague à l’âme de ses nuits sans sommeil. Echo de ces paroles du livre des Lamentations qu’il a souvent priées et que j’ai choisies pour sa dernière pâque que nous célébrons dans cette cathédrale : « La paix a déserté mon âme, toute mon assurance a disparu ». Mais c’est dans ce creuset de la misère humaine que jaillit le chant de l’espérance dans ce même livre des Lamentations : « Voici que je rappelle en mon cœur ce qui fait mon espérance. Le Seigneur est bon et c’est une bonne chose d’attendre en silence le secours du bonheur ». L’ultime parole de Mgr Feidt fait écho à ces paroles de l’Ecriture : « Jamais je ne perdrai mon espérance ». Son testament spirituel est une prière empruntée à son saint patron, saint Claude de la Colombière. Prière que vous pourrez lire sur l’image souvenir que vous recevrez à la fin de cette célébration.

La prière du testament commence par ces mots : « Mon Dieu, je suis si persuadé que tu veilles sur ceux qui espèrent en Toi… que j’ai résolu de vivre à l’avenir sans aucun souci et de me décharger sur Toi de toutes mes inquiétudes ». Et elle se poursuit ainsi : « Jamais je ne perdrai mon espérance, je la conserverai jusqu’au dernier moment de ma vie, et tous les démons de l’enfer feront à ce moment de vains efforts pour me l’arracher ». Je peux témoigner que Mgr Feidt a été exaucé avant l’heure de sa mort. Lorsque je lui ai téléphoné il y a 3-4 semaines, je l’ai trouvé paisible et serein, attendant l’heure, dans l’espérance. La prière de saint Claude s’achève par ces mots : « Je me tiens à couvert de tous les malheurs et je suis assuré d’espérer toujours, parce que j’espère encore cette invariable espérance ».

Quelle est donc cette espérance que nous laisse aujourd’hui Mgr Feidt et qu’il a reçue lui-même comme la grâce de sa vie ?

L’espérance dans le mystère de l’Eglise Epouse du Christ.

Ordonné évêque en 1980 à l’âge de 44 ans, Mgr Feidt aura porté pendant la moitié de sa vie cette grâce de l’ordination épiscopale, cette grâce de l’espérance. Pendant ces 40 ans, à vue humaine l’Eglise a vécu un véritable déclin. On pourrait presque parler d’une faillite, toujours à vue humaine. Que d’épreuves se sont abattues sur l’institution Eglise ! Mgr Feidt a pourtant gardé toute son espérance en elle, dans le mystère qu’elle porte, elle, l’Epouse du Christ. Oui, il aimait l’Eglise, passionnément, l’amour de sa vie, tout entière donnée à elle, dans le Christ Jésus. Eglise une et sainte, catholique et apostolique. Eglise sainte parce que remplie de la divine présence, habitée par l’éternel Amour, animée par l’Esprit Saint.

L’espérance dans le mystère de l’ordination

Le mystère de sa propre ordination : diacre, prêtre et évêque. Le même et unique sacrement de l’ordination, grâce insondable et surabondante de l’Esprit Saint qui se répand dans le peuple de Dieu pour le configurer au Christ. Serviteur et Pasteur, Mgr Feidt aura ordonné une douzaine de prêtres et une douzaine de diacres permanents pendant les 10 années de son ministère à Aix et Arles. « Co-ordonnés à l’évêque, et non subordonnés » écrira-t-il dans une lettre aux prêtres le 14 décembre 2006 en la fête de saint Jean de la Croix. Et il m’a souvent dit combien il aimait prêcher sur le discours d’adieu de Paul aux anciens d’Ephèse (Actes 20, 17-38) : « Veillez, prenez soin des fidèles du Christ, soyez les bergers de l’Eglise de Dieu ». Espérance dans la grâce et par la grâce du sacrement de l’ordination. Mystère de l’appel. Mystère de la vocation. Prions aujourd’hui pour que Dieu suscite des vocations de prêtres pour la mission de l’Eglise.

L’espérance en Jésus-Christ vivant, ressuscité

La grâce de l’espérance, Mgr Feidt l’a reçue de son union intime au Christ vivant. Espérance puisée dans la Passion et la Crucifixion où le Seigneur portait le poids des souffrances du monde. Espérance puisée dans un acte de foi renouvelé chaque jour en la Résurrection. Espérance puisée dans la célébration quotidienne de l’Eucharistie. Espérance puisée dans la prière du Christ, la prière dite sacerdotale que nous rapporte saint Jean et dont j’ai choisi un extrait pour cette messe d’adieu : « Père, ceux que tu m’as donnés, je veux qu’ils contemplent ma gloire. Je veux que là où je suis, eux aussi soient avec moi…, pour qu’ils aient en eux l’amour dont tu m’as aimé ».

Qu’il est bon de recevoir le cadeau de l’espérance en ce jour où nous remettons au Père notre frère. Que le Christ vive en nous, que l’amour du Père nous brûle et rayonne, que l’Esprit Saint fasse de nous des témoins de l’espérance chrétienne, c’est l’ultime prière de l’évêque Claude Feidt. Ne nous laissons pas voler la Joie de l’Evangile. Ne nous laissons pas voler l’espérance que donne la foi en Jésus ressuscité.

Amen.

Mgr Christophe Dufour, archevêque d’Aix-en-Provence et Arles

Homélie de Mgr Dufour