« Pour le Christ, l’autel c’est la Croix sur laquelle Il s’offre en sacrifice » : l’homélie de Mgr Dufour pour la consécration de l’autel d’Orgon

À l’occasion de la consécration du nouvel autel d’Orgon, Mgr Dufour est revenu dans son homélie sur la symbolique de la mémoire et du sacrifice pour les chrétiens.

Frères et sœurs, lorsque vous entrez dans une église, que regardez-vous en premier ? Vous cherchez la petite lampe rouge qui indique la présence réelle du Christ dans le Saint-Sacrement pour vous recueillir devant lui et l’adorer dans le silence de votre cœur. Vous cherchez la statue de la Vierge Marie pour lui confier vos intentions de prière. Vous cherchez la statue de tel saint ou sainte pour qui avez une affection et une dévotion particulière et par qui vous voulez obtenir une grâce particulière. Ici, vous aimerez vous recueillir devant la barque des saintes Marie Jacobé et Salomé. Le tabernacle, les statues, tout cela est beau et important, mais le plus important, c’est l’autel. Voilà pourquoi l’Eglise l’honore par le rite de la consécration – et pas seulement une bénédiction.

C’est une tradition religieuse ancestrale de bâtir des autels qui inscrivent des évènements et des paroles dans la mémoire et les transmettent ainsi aux générations futures. Un autel est un mémorial. Dans la Bible, Abraham, le premier, bâtit un autel pour le Seigneur. C’était à Sichem, le jour où Abraham reçut la promesse de Dieu, la promesse d’une terre. Nous avons entendu le récit où Josué, après la conquête de la terre promise, bâtit un autel sur le mont Ebal en Samarie, face au mont Garizim, là où la femme de Samarie venait adorer Dieu. Aujourd’hui nous allons consacrer l’autel de cette église dédiée à Notre-Dame de Beauregard. Autel taillé dans la pierre par un tailleur de pierre – ici présent, merci à lui – et merci aux généreux donateurs dont l’une est ici présente, merci à elle.

Pourquoi l’autel est-il le plus important dans une église ? Parce qu’il rend visible l’évènement le plus important de toute l’histoire de l’humanité ; il est le mémorial du don d’amour de Dieu en Jésus sur la Croix. Dieu se rend visible, Dieu se donne. Chaque fois que nous faisons mémoire de la mort et la résurrection du Christ, mystère de Pâques, mystère de la foi, Dieu se rend réellement présent au milieu de nous, il vient habiter au milieu de nous. Oh qu’il est grand, qu’il est beau le mystère de notre foi chrétienne !

La liturgie de consécration de l’autel nous donne à voir cinq gestes :

  • Nous avons mouillé l’autel : comme Jésus au Jourdain, comme le chrétien le jour de son baptême.
  • Nous allons consacrer l’autel par l’onction d’huile sainte, le saint chrême : comme le Christ – le mot Christ signifie celui qui a reçu l’onction – ; comme le chrétien à son baptême. Onction de l’Esprit Saint qui nous remplit de l’amour infini de Dieu. Onction qui fait de nous des enfants de Dieu, nés de l’éternel Amour du Père. Onction qui nous fait renaître à chaque eucharistie lorsque nous implorons l’Esprit Saint sur nos offrandes.
  • Nous allons parfumer l’autel : pour qu’il répande, comme le baptisé, le parfum d’amour du Christ. Parfum de notre prière qui monte vers Dieu comme l’encens. Parfum de nos offrandes transformées par l’amour du Christ.
  • Nous allons revêtir l’autel du vêtement de la table eucharistique, la nappe blanche : comme le baptisé est revêtu du vêtement blanc de son baptême, il a revêtu le Christ.
  • Nous allons illuminer l’autel : pour qu’il répande la lumière du Christ ressuscité, lumière de l’amour plus fort que la mort.

Vous avez reconnu les gestes du baptême. La consécration d’un autel ravive la grâce de la consécration de notre baptême.

Pour le Christ, l’autel c’est la Croix, sur laquelle il s’offre en sacrifice.

Pour nous, baptisés, le Christ est l’autel sur lequel nous nous offrons en offrandes spirituelles à chaque eucharistie.

Pour le monde, le chrétien est l’autel sur lequel tous les humains peuvent s’appuyer comme sur un roc. La communauté chrétienne est l’autel du sacrifice, l’autel de l’amour. Et depuis le commencement où l’Eglise célébrait l’eucharistie sur les tombes des martyrs qui ont donné leur vie en témoignage de leur foi, la messe est célébrée sur les reliques des saints. Aujourd’hui, les reliques des saintes Marie Jacobé et Salomé seront déposées dans l’autel que nous allons consacrer.

Ainsi l’autel rend visible le mystère caché du salut de Dieu, la réalité invisible de son éternel Amour manifesté dans le Christ. « L’heure vient, dit Jésus à la femme de Samarie, l’heure vient où les vrais adorateurs adoreront le Père en Esprit et en vérité ». Le rite de la dédicace de l’autel n’est pas un spectacle ; il est une réalité spirituelle que nous vivons avec le cœur, en esprit et en vérité. Le Christ révèle le Père, source de tout don, source de l’Esprit Créateur. Offrons-nous à lui en offrandes spirituelles. Je confie tous les pèlerins qui passeront la porte de cette église. Je rends grâces pour les vocations de prêtres, de religieux, de religieuses et de consacrés suscitées par la prière de Notre-Dame de Beauregard. Que nous soit donnée aujourd’hui la grâce de nous offrir à Dieu à l’exemple de la Vierge Marie, la première des consacrées. Au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit.

AMEN.