La lumière est invisible, et le vitrail la donne à voir

Dimanche 29 avril, Monseigneur Christophe Dufour, archevêque du diocèse d’Aix et Arles, a célébré la messe à la chapelle en haut de la montagne Sainte-Victoire et y a béni les nouveaux vitraux.

Homélie de Mgr Christophe DUFOUR

Pèlerinage à Sainte Victoire

Bénédiction des vitraux du prieuré

Dimanche 29 avril 2018

5ème dimanche de Pâques année B

 

Frères et sœurs, l’amour est invisible. Je vous vois devant moi. Je devine, je pressens, j’ose même dire je sais, je sais que vos cœurs sont habités par l’amour. Je le sais dans la foi, la foi en vous qui êtes là devant moi. Je sais que vos cœurs sont habités par l’amour, par un immense amour. Je le sais, mais je ne le vois pas. L’amour est invisible. Il est invisible, mais il veut se donner à voir. A voir dans des gestes. A voir dans des actes. « Aimons en actes et en vérité » dit saint Jean dans sa belle que nous avons proclamée aujourd’hui.

Ainsi est Dieu. Il est invisible et il veut se donner à voir. Il veut donner à voir la lumière de son éternel amour. Et puisqu’en ce roumavage 2018 exceptionnel nous allons bénir les vitraux de la chapelle du prieuré Sainte Victoire, je vous parlerai du vitrail comme d’une parabole de la lumière qui se donne à voir.

La lumière est invisible, et le vitrail la donne à voir. Le vitrail n’est pas la lumière, mais il donne à voir la lumière. Sans la lumière, le vitrail n’est rien. Mais sans le vitrail, la lumière demeure invisible. Le vitrail a besoin de la lumière, et la lumière a besoin du vitrail. La lumière se donne dans le vitrail, et le vitrail se laisse traverser par la lumière. La lumière est dans le vitrail et le vitrail est dans la lumière.

Le vitrail, c’est d’abord de la matière. De la matière travaillée. De la matière que les mains de l’artiste et de l’artisan ont transformée par leur inspiration créatrice. Je salue ici Gérard Tessier, maître verrier qui a créé les vitraux, et les membres de l’association Massilia Vitrail qui les ont réalisés. Bravo. Leur création d’artiste et d’artisan a rendu visible leur mystérieuse inspiration cachée, leur amour du Beau, de l’harmonie et du travail bien fait.

Ainsi en est-il de Dieu : pour se donner à voir, il a créé l’univers. Avec les yeux de la foi, les humains ont tenté de déchiffrer le message inscrit par le Créateur dans sa Création. Mais souvent ils ne l’ont pas vu, ils ont adoré leurs idoles et l’ouvrage de leurs mains, ils ont fait de l’homme un dieu et ils sont devenus aveugles. C’est pourquoi lorsque les temps furent accomplis, Dieu s’est donné à voir dans le Christ Jésus. Le Christ est le vitrail de Dieu. En lui Dieu se donne à voir. En lui se donne à voir la lumière invisible de l’éternel Amour.

« Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron » dit le Christ. Et il ajoute : « Je suis la vigne, et vous êtes les sarments ». La parabole de vigne rejoint celle du vitrail. « Demeurez en moi comme moi en vous ». Si la sève de la vigne – invisible – ne monte pas des racines – invisibles – vers les sarments, les sarments ne peuvent pas porter du fruit. C’est ainsi que la sève de l’amour du Christ monte dans les cœurs des chrétiens pour porter au monde son fruit d’amour.

La lumière est dans le vitrail et le vitrail est dans la lumière, disions-nous. Chrétiens, nous sommes appelés à être nous-mêmes des vitraux qui donnent à voir la lumière invisible de l’amour de Dieu. En ce jour où j’ai la joie de bénir les vitraux de la chapelle du prieuré Sainte Victoire, je voudrais faire mémoire de Marc Roussel qui fut président des amis de Sainte Victoire de 2010 à 2015. Il  aurait aimé être avec nous aujourd’hui, mais il vient de vivre sa dernière pâque et c’est du haut du ciel qu’il nous contemple ce matin. Il était lui-même un beau vitrail. Par tout son être, il donnait à voir la lumière de l’amour divin qui l’habitait profondément et qu’il rayonnait autour de lui. Il se laissait traverser par l’amour et toute sa vie le donnait à voir. Vous le verrez dans les vitraux. Oui, allez le voir. Je l’ai vu. Les six vitraux donnent à voir un mystérieux escalier. Certes, vous y verrez le chemin qui mène au sommet de la montagne Sainte Victoire. Mais vous y verrez aussi celui qui mène au ciel de l’éternel Amour. Dans les deux vitraux au niveau de l’autel – entre parenthèses, savez-vous que le marbre de l’autel est un marbre de la brèche du Tholonet et qu’il est le parfait jumeau du marbre de la brèche d’Alep en Syrie ! Dans les vitraux qui encadrent cet autel,  les ailes de la Croix de Pâques sont l’étape ultime, celle que vient de franchir Marc ROUSSEL. Sa mort nous bouleverse, mais n’en doutons pas, elle est un clin d’œil. Et je l’imagine au ciel avec l’abbé Jean Aubert. « Bravo les amis ! » disent-ils en chœur.

Le vitrail donne à voir la lumière. Mais le vitrail n’est pas la lumière. Chrétiens, nous reconnaissons dans le Christ la source de lumière. Il est le soleil levant venu nous visiter. Il est une étoile dans la nuit. Il est la lumière du monde. Sa résurrection en est le signe décisif dans notre histoire humaine. Il est le vitrail de Dieu. Par sa lumière, nous voyons la lumière, la lumière de l’éternel Amour. AMEN.